RAID 2CV " EGYPTE SINAI "

          OCTOBRE 1997
        Organisation J.P. Lenfant P. Pétré
 
 
 

                                                
 
 
 

SAMEDI 4 OCTOBRE  97
 L’appareil d’Air Liberté nous propulse d’un coup d’aile de Toulouse a Paris ou nous avions rendez vous a 17h au comptoir d’air Egypte avec les  autres participants du raid . Gros bruit dans le hall de  d’Orly Sud .Pas de problème tout le monde est la (y compris les pompier ) venu dire au revoir aux "heureux" partants . Trois heures de vol plus tard , les lumières du Caire sont en vue , atterrissage et dés les premières formalités il faut se rendre a l’ évidence . Nous sommes bien sur le continent africain , d’un coup notre sens du temps (temps perdu , inutile , mort ...) va devoir baisser son tempo de plusieurs mesures . Deux heures pour un tampon sur un passeport et heureuse surprise: pas de fouille des bagages par la douane .Ce qui veut dire que la petite bouteille d’Armagnac "hors d’ âge" dissimulée dans le duvet , finira sans doute ses jours dans les dunes du sinai , plutôt que dans l’armoire a pharmacie d’un douanier égyptien !  Des la sortie de l’aéroport tout les s’ accélère soudainement : embarquement des bagages et des passagers séance tenante dans deux autobus nous amènent a notre hôtel .Cette soudaine hâte d’embarquer dans les autobus s’explique par le fait que quelques jours auparavant autobus rempli de touristes allemands a été victime d’un attentat de la part des islamistes intégristes égyptiens. Il ne fait donc pas bon traîner devant un bus .

Changement de programme compte tenu du retard pris au débarquement : Nous dormirons au Caire au lieu de nous rendre à Alexandrie comme prévu pour ce soir .
Débarquement façon commando para devant l’ hôtel et tout le monde à l’intérieur ( Toujours la peur des attentats )Il est
minuit. Douche rapide et première nuit en Egypte bercé par les Klaxons incessants des "Alesi " locaux et la valse à trois
temps ronflée en sol majeur par mon camarade de chambre .

DIMANCHE 5 OCTOBRE 97

 Petit déjeuner prévu à 6 heures ! . Embarquement "façon commando marine" des passagers et bagages dans le bus, sous la
protection de deux militaires en armes. En route pour Alexandrie , 200 Kms au Nord Est.
La circulation et la pollution au Caire sont dantesques ! . Une corrida perpétuelle où s’affrontent   mini bus et  taxis à une
armée de   piétons qui tentent vraisemblablement d’aller travailler . Le Caire la nuit : Bien . Le Caire le jour : Pas bien. Des
immeubles de bric et de broc ,  11 millions d’habitants , la 3° ville du monde , un nuage bleu de pollution permanent  à
décourager l’écolo le plus tenace. Après 2 heures de corps à corps dans une circulation folle, notre chauffeur de bus entame
l’autoroute qui nous mène au port d’Alexandrie où nous passons la journée entière dans un hall à attendre le dédouanement
de nos 2Cv . 19H  toujours pas de 2CV et nous embarquons dans un bus qui nous amène dans un hôtel d’Alexandrie .
L’affaire commence mal, car ce soir nous aurions dû nous diriger vers le Caire au volant de nos 2CV .

LUNDI 6 OCTOBRE 97

 Grasse matinée et à 10 h du matin un bus amène les pilotes au port pour récupérer (enfin) les 2Cv . Journée de repos pour
les co pilotes qui restent à attendre à l’ hôtel .
 13 Heures. Toujours rien. Manque de chance, nous apprenons que c’est aujourd’hui la fête nationale ! et nous commençons
à craindre de devoir attendre un jour de plus. Quelques informations nous parviennent: le consul de France a alerté le Quai
d’Orsay à Paris . Le premier ministre égyptien est sur coup ! .
 15 Heures Toujours rien. Le hall de l’hôtel encombrés de bagages ressemble plus à un rassemblement de sans papiers qu’à
un hall d’hôtel 4 étoiles.
 16 Heures. Un bus arrive . Embarquement fébrile pour le port. Arrivés dans le port, il fait nuit. Encore une heure d’attente et
toujours pas de 2CV en vue . La grogne commence à monter les explications avec la police qui nous accompagne dans tous
nos déplacements deviennent houleux dans un anglais approximatif et beaucoup de gestes.
19 Heures. Miracle. Les voici les 2CV. Une par une sortant du port . Ouf. Très éprouvés les pilotes ont passés une journée
entière dans un entrepôt  en se partageant les réserves trouvées dans les 2CV.
Vite . Un plein d’essence ( mieux que chez Leclerc ) et direction le Caire ou après 200 Kms nous arrivons tardivement dans
un camping situé dans la banlieue.
 

MARDI 7 OCTOBRE 97

 5 Heures du matin : Le Muzäin de service déverse ses prières monocordes sur le camping endormi. Petit Déjeuner et  en
route pour la 1° spéciale qui doit se dérouler autour des pyramides .
Spéciale de mise en train facile et rapide qui se termine dans un immense dépotoir où se côtoient mouches, enfants décharnés,
cadavres d’animaux en décomposition . Les pyramides sont là devant  imposantes au soleil . Les touristes sont de l’autre
coté  des pyramides dans leur bus climatisés. Ici la misère la plus sordide se cache derrière une des merveilles du monde, ce
qui fera dire à un des pilotes amateurs de phrase choc  et psychanalyste de son état :
" Les pyramides ont aussi leur trou du cul ! "
 
 

 Le convoi des 2CV arrive maintenant devant les Pyramides. Photo souvenir et départ pour autre spéciale de 60 Kms se
déroulant en partie dans une immense carrière et un plateau lunaire parsemé de cailloux et traversé d’oueds.
 Première difficulté avec le Road Book: Impossible de trouver le CP3 (Contrôle de passage obligatoire) Tant pis, après avoir
tourné en rond, nous décidons de le sauter , nous terminons la spéciale dans les dix premiers et apprenons que le CP3 a été
annulé.
 Déjà de la casse. On apprend que  l a 2CV Bimoteur des Toulousains a cassé un tirant de suspension en début de spéciale
et  de plus étant perdu devra peut être passer sa première nuit dans le désert. Petite angoisse tout de même car ici pas
d’hélicoptère qui vous cherche comme au Paris Dakar. Seuls les 4X4 d’assistance sont chargés de ramener les brebis
perdues. Heureusement  retrouvée par un 4X4 d’assistance un peu perdu lui aussi , et après avoir vidé une bouteille
d’armagnac pour fêter l’événement, c’est en pleine forme et à 1 heure du matin que la 2Cv Bimoteur va rejoindre le bivouac.
 La spéciale terminée , il fait nuit et il nous reste une liaison de 80 Kms. Nous retrouvons le bitume et nous apercevons que la
2CV a souffert  dans  cette première spéciale très dure. Plus de lumière : Les ampoules sont tombées au fond des phares ! Le
pot d’échappement est en partie arraché, le moteur refuse de prendre les tours et nous plafonnons à 50 Km/h.
Aubaine: Une station Service. Nous nous installons sous un lampadaire , réparons l’éclairage, changeons les capteurs  et le
boîtier de l’allumage électronique ( Moteur Visa ) finissons d’arracher le pot d’échappement et nous voila repartis . Le moteur
refuse toujours de prendre les tours et  nous pensons qu’il s’agit vraisemblablement d ‘un problème de pointeau qui malmené
lors de la spéciale , se bloque. Mais après quelques Kilomètres , par miracle le moteur retrouve ses chevaux. En
échappement libre , nous traversons le tunnel sous le canal de Suez et nous ne tardons pas a trouver deux 2 CV arrêtées le
long de la route , et privées d’éclairage . Coup de chance , nous avons une deuxième batterie que nous prêtons à l’un deux ,
quant à l’autre 2CV il va nous suivre collé à notre pare choc pour une ballade de plus de 50 Kms dans la campagne
égyptienne . Le bivouac est ce soir en principe d’ après le road book situé à quelques Kms de la route . Hélas nuit noire
complète , nous sommes complètement perdus sans point de repère et tournons plus d’une heure  sur cette route ou ne passe
personne. Nous tentons de trouver le bivouac au cap : peine perdue tout se ressemble à la lumière des phares . Il est 23
heures . Soudain dans le lointain une lumière . Nous fonçons droit dessus à travers cailloux et buisson et finissons par rattraper
un véhicule d’assistance en train de ramasser les attardés perdus dans le désert. Nous apprenons en arrivant au bivouac que
celui ci était en fait impossible à localiser sans l’aide d’un GPS.

MERCREDI 8 OCTOBRE 97

 Réveil à 7 heures et départ pour une spéciale qui doit se dérouler sur le terrain où se sont affrontés durant la guerre des Six
Jours les Israéliens et les Egyptiens .Spéciale très roulante avec quelques zones de fech et à l’horizon quelques mirages.
Après la spéciale , départ au cap pour l’étape la plus dure du Raid. Après quelques kilomètres nous trouvons les Suisses qui
tournent en rond. Nous avons ce matin décidés de rouler en groupe de 5 voitures, et grâce à la CB nous sommes en
permanence en contact. Après de longues errances dans des terrains caillouteux brûlés de soleil, nous trouvons le campement
d’un bédouin qui nous offre café et cigarettes. Le premier magasin est à 60 Kms de piste d’ici. Par signe le bédouin nous fait
comprendre qu’il faut passer de l’autre coté

de la montagne. Nous partons pour contourner la montagne, alors que quelques intrépides attaquent la montagne de front
avec une technique à faire frémir: La 2CV est de 3/4 face à la pente , le conducteur et le passager sont descendus et poussent
la voiture . A l’aide d’un câble, le conducteur ( pousseur ) dose les accélérations du moteur et surveille les roues qui mordent
centimètres par centimètres la montagne .
De l’autre coté de la montagne , nous retrouvons un autre groupe qui revient sur ses pas accompagné d’un 4x4 d’assistance .
Nous traversons un oued pourri et nous nous regroupons avant d’attaquer la montagne .
Au fur à mesure les difficultés augmentent , du véritable trial ! .On commence à comprendre pourquoi l’ organisateur nous a
annoncé qu’il s’agissait d’une première car  à ce jour aucune voiture deux roues motrices n’aurait emprunté cette piste. La
progression étant très lente la nuit nous surprend dans une montée difficile ou seules les 2CV 4X4 passent avec aisance. Nous
franchissons un col à 1600 m et entamons une véritable descente aux enfers. Inquiet, l’organisateur décide d’arrêter tout le
monde . En effet on aurait entendu sur une CB que les deux 2Cv suisses sont au fond d’un ravin. Arrêté dans la nuit noire tout
le raid assiste en direct au sauvetage des Suisses que l’on entend par moment à la CB sans savoir où ils sont. Comme il est
impossible de les localiser dans ce dédale de montagne recouvert d’une nuit d’encre , l’équipage suisse annonce à la CB
qu’ils vont tirer leur fusée de détresse. Tout le monde se tait dans le convoi, toutes les lumières sont éteintes et soudain dans la
nuit au cap 45° une fusée rouge s’élève dans le ciel.
Sous les applaudissements de tout le groupe les 4x4 d’assistance s’élancent pour récupérer  les équipages suisses. Petite
astuce d’un pilote suisse perdu au fond d’un ravin pour mieux se faire repérer : démonter les phares de la 2CV et les tourner
vers le ciel ! .
Il est 23 h et compte tenu des risques , l’organisateur décide que ce soir nous allons dormir là ou nous sommes . D’autres
2CV sont encore sur la piste et les commentaires à la CB vont bon train :
 "René tu montes le troisième " s’inquiète Jeanine.
 " Et toi Jeanine tu montes quand ? interroge un plaisantin sur une autre CB.
 " Ca va tarder " répond Jeanine imperturbable qui répondait en fait à un autre interlocuteur.
 Sur la droite de la piste une zone plane et caillouteuse accueille les tentes et vers 24 h le silence commence à tomber sur le
bivouac. Un quart d’heure plus tard , bruit de moteur et applaudissements dans la nuit . Les 4x4 viennent de ramener les
équipages suisses fort éprouvés au bivouac. Le silence retombe dans ces montagnes mythiques et mystiques à quelques pas
du Mont Sinaï où Moïse reçut  de Yahwee il y a 4000 ans les tables de la Loi.  Pas de problème de digestion ce soir . les
sandwichs de midi sont déjà loin et le repas prévu pour ce soir nous attend à 40 Kms d’ici.

JEUDI 9 OCTOBRE 97

 Réveil à 6 heures dans un cadre grandiose . Petit déjeuner pour les chanceux équipés d’un réchaud . Au briefing de 7 Heures
l’organisateur nous informe :
 " Le meilleur reste à venir . La piste que nous devions prendre est effondrée nous allons être obligés de passer par une autre
piste . Pour attraper cette piste il faut emprunter une descente a sens unique : une fois descendu , plus personne ne pourra
remonter y compris les 4x4 ! . Ensuite il nous faudra pousser les voitures voire les porter pour franchir les dernières difficultés
qui nous mèneront au golfe

d’Akabba ! "
 Juste avant de s’élancer pour ce programme fourni , un concurrent s’ aperçoit que sa boite à vitesse est coincée . Séquelle
de la journée d’hier . La solidarité de la 2CV se retrouve ici aussi. Une boite à vitesse est sortie d’une malle, 6 mains expertes
se jettent sur la 2CV récalcitrante et 44 mn plus tard ( chrono en main ) la 2CV repart  vers l’aventure. Les premiers à
franchir les difficultés informent pair CB le reste de la troupe. Des montagnes, des oueds, des cailloux , des trous , des bosses
.
 Un petit arrêt mécanique pour un condensateur défaillant sur la 2CV Bimoteur des toulousains, et vers 13h 30 la joie
d’apercevoir le point d’assistance . de l’eau et du thé .Le moral remonte .
 Après l’assistance une spéciale nous attends . Malgré le nombre de Kms restant à parcourir pour revenir à Alexandrie, les
2CV se jettent dans ce terrain pourri pour la course au chrono. En voulant doubler un concurrent que nous avons rattrapé,
aveuglés par la poussière , nous tombons le nez en avant dans un oued .Grand choc, grand bruit . Marche arrière. Nous
repartons. Mais dés les premiers mètres phénomène bizarre nous sommes bombardés de cailloux qui nous arrivent sur le pare
brise. L’arrivée est toute proche et nous franchissons la ligne d’arrivée au ralenti . Inspection de la 2CV: une crevaison et la
plaque de protection sous le moteur arrachée. C’est elle qui en raclant la piste comme une pelle nous envoyait les cailloux.
Pas grave nous continuons car plus loin deux autres  difficultés nous attendent . La montée impossible et une marche de prés
de 1 m à franchir .
Redoutable montée de 100 m environ ou seules les 2CV 4X4 feront la démonstration de leur aptitude au tout terrain. Pour les
autres ce sera la poussette ou la corde charitable du 4X4.
Quelques kilomètres plus loin voici la fameuse marche tant redoutée. Taillée dans un rocher blanc nous l’abordons de face et
la franchissons sans coup férir . En fait les concurrents précédents ont joués les terrassiers du désert en amenant des cailloux
prés de la marche et l’organisateur n’a pas eu à utiliser le sac de ciment qu’il trimballe depuis Paris en prévision de ce passage
.
 La fin de l’étape se déroule dans un canyon dont le fond est tapissé de 30 cm de gravier fin.
Travers, accélération mon pilote s’en donne à coeur joie. Soudain un grand bruit dans la voiture. Nous sommes arrêtés.
Première. Marche arrière. Nous sommes toujours scotché dans le gravier. Pas de panique: Nous enclenchons les 4 roues
motrices. Le moteur vrombit, mais rien n’y fait. Nous avons encore des ressources: Nous enclenchons les vitesses réduites
puis le blocage du différentiel mais sans succès. Nous descendons de la 2CV et constatons que nous sommes juchés sur un
énorme caillou et que quasiment aucune des 4 roues ne touche le sol !.
On gratte le sol, on tire on pousse et nous voila repartis . Nous constatons très vite au bruit qui règne maintenant dans la 2CV
que nous avons dû perdre le pot d’échappement dans cette affaire .
Quelques kilomètres plus loin nous retrouvons le bitume que nous avons quitté il y a deux jours et sommes tout étonnés de
rouler sans entendre en permanence le choc des roues sur les cailloux de la piste.
Nous arrivons de nuit à Nuweiba et nous découvrons au bout de nos phares  la mer calme comme un lac du golfe d’Akaba
.Nous nous installons dans un camping et tout le monde se précipite pour une douche froide ( eau  à 30° ! )  et deux demis
sans respirer à l’hôtel de luxe pour touristes de la plage.
 
 
 

SAMEDI 11 OCTOBRE

 Repos à Nuweba avec au programme visite de Petra en Jordanie classé comme l’ une des plus belles merveilles du monde.
Après les attentes administratives pour quitter l’Egypte une vedette rapide nous amène au port d’Akaba en Jordanie .
Changement important: le pays est beaucoup plus riche et propre que l’Egypte mais en contrepartie le Dinar Jordanien a joué
l’inflation après la guerre du Golfe: 16F la bouteille d’eau et 32 F la bière. Les Jordaniens sont des gens commerçants et
accueillants . Nous visitons en touristes ce site fabuleux de Petra ou 400 ans avant J.C le peuple nabatéen a sculpté dans la
roche d’une vallée  des temples d’une perfection architecturale à vous couper le souffle.

DIMANCHE 12 OCTOBRE

 Réveil à 6 Heures . Transfert au port d’Akaba . Vedette rapide , formalités pour rentrer en Egypte et nous retrouvons avec
plaisir nos vaillantes 2CV qui ont bien dû se reposer un peu . Mais oh ! surprise en arrivant dans le camping où les voitures
étaient sous la garde de la police . Quelques plaisantins du Raid en ont profités pour intervertir les capots et malles des 2CV
!!
Mécanique pour certains , plongée sous marine pour d’autres qui avoueront avoir eu l’impression de plonger dans un
aquarium tant la faune sous marine est abondante.
Histoire de ne pas s’engourdir une spéciale est improvisée sur la plage , mais sera annulée car la nuit tombant très vite , rendra
l’exercice périlleux a cause des tranchées qui coupent la plage.

LUNDI 13 OCTOBRE

 Réveil 6 heures . Petit déjeuner et le départ prévu à 8 heures est retardé car nous attendons un policier qui doit nous escorter
. Faut préciser que nous sommes escortés par la police depuis le Caire . Hélas nos anges gardiens équipés d’une 405
Peugeot ont connus tout un tas de déboires mécaniques à vouloir nous suivre et ont déclarés forfait. Nous partons enfin . Une
vingtaine  de kilomètres de goudron et nous attaquons une spéciale . Nous sommes partis prudemment  et nous faisons
doubler par un jeune et fougueux pilote( breton ) et nous nous apercevons lorsqu’il nous double que sa malle s’est ouverte et
qu’il joue le petit Poucet du désert  . En effet quelques  kilomètres plus loin un choc sous la voiture . Nous venons de heurter
de plein fouet un bras avant de 2CV moitié enfoui dans le sable. Pas le temps de s’arrêter, le chrono tourne et nous faisons
confiance au 4x4 d’assistance pour récupérer le bras. Tout au long de cette spéciale nous avons pris garde de ne pas  nous
éloigner de la piste car le Road Book signale deux champs de mines  dans le secteur.
Spéciale terminée et en plein désert nous devons présenter les cartes grises de nos 2cv, car nous pénétrons dans un camp
militaire. Toujours la crainte pour les Egyptiens de voir surgir du désert quelque commando Israelien !  La liaison de 40 Kms
qui suit se déroule  dans un mélange de gravier et de sable où les 2cv 4X4 s’en tirent à merveille. Le bivouac de ce

soir a été reculé de quelques kms dans la montagne, car fait rarissime , l’orage gronde et  l’oued où nous devions dormir
pourrais subitement se remplir d’eau. La nuit est déjà tombée depuis longtemps et les 2cv arrivent en convoi encadrées par
l’assistance.
La 2cv de Jean Marie a souffert des zones sablonneuses et sa boite à vitesse est coincée. Sans hésiter et sous la pluie qui
s’abat sur le camp, la boite à vitesse est démontée , les synchros et baladeurs remis en place et demain matin la 2cv repartira
comme si de rien n’était . Merci Eric, Christian et les autres !

MARDI 14 OCTOBRE

 La nuit à la belle étoile à 1300 m d’altitude dans un duvet bien chaud et sous le ciel redevenu étoilé laissera un ineffable
souvenir. Le départ au matin se fait au milieu de roches peintes en bleu par un peintre belge qui a voulu ainsi laisser dans le
désert un symbole commémorant la paix signée entre Egyptiens et Israeliens.
Aujourd’hui au programme un peu de tourisme avec 10 mn pour photographier le Mont Sinai ou le prophète reçu jadis les
tables de la Loi. Nous retrouvons très brièvement le bitume que nous quittons après 22 Kms pour le départ d’une nouvelle
spéciale.
 Nous commençons à prendre goût a ces spéciales ou la règle du jeu consiste a aller le plus vite possible sans endommager la
2cv car la route est encore longue. Nous rattrapons rapidement la 2cv partie devant nous et par impatience ou manque de
visibilité, nous quittons la piste , et dans un nuage de poussière nous nous jetons sur un tas de cailloux de 80 cm de haut qui
nous projette en l’air dans un bruit de canon. Aïe ! Attention à l’atterrissage ! Nous atterrissons sur le pneu avant gauche qui
surmené ,nous lâche dans un bruit de pétard mouillé et au même moment la 2cv est envahie de fumée. L’atterissage a été si
rude que un court circuit s’est produit dans le faisceau électrique qui est en train de brûler. Comme deux diables hors de leur
boite, nous nous précipitons sous le capot moteur et sans crainte des brûlures, nous arrachons sauvagement les fils du
faisceau. Remède efficace , la fumée se dissipe , la poussière aussi et nous nous retrouvons soudain dans un grand silence
réalisant qu’il va falloir tenter de repartir le plus vite possible. Heureusement Jo le pilote connaît le câblage de la 2cv comme le
fond de sa poche , quelques fils branchés, et le valeureux moteur de Visa repart comme à la parade. La roue changée nous
voici repartis à la conquête du chrono. De trous en bosses nous nous rapprochons de l’arrivée tout en constatant que nous
sommes littéralement envahis de poussière a l’intérieur de la 2cv. La ligne d’arrivée franchie, nous nous apercevrons que nous
avons perdu la lunette arrière qui fort heureusement est tombée dans la malle.
La liaison qui suit cette spéciale se déroule dans un cadre grandiose sur une piste difficile pavée d’énormes cailloux. Affaissée
de l’avant , notre vaillante 2cv racle sans cesse la piste dans un bruit de monstre à l’agonie. Seule solution pour rejoindre le
bivouac , charger l’ arrière pour délester l’avant, et me voici tel Ben Hur sur son char debout sur le parechoc arrière me
cramponnant tant bien que mal par la vitre arrière que heureusement nous n’avions pas remonté. Un concurrent s’est arrêté
devant nous et sur cette piste très étroite, nous sommes obligés de nous arrêter. Surgi de on ne sait où, un bédouin vêtu de
blanc nous prononce un seul mot "water " . Nous nous doutons qu’il n’est pas en train de nous demander les vespasiennes du
coin , mais hélas nous sommes tous a court d’eau . Devant la gentillesse naturelle, émanant de son visage, nous lui offrons des
stylos bille et uns casquette. Comme il

parait surpris en tenant les stylos dans sa main, nous nous disons qu’il n’a peut être pas de papier et nous lui offrons un carnet
. Nous repartons le laissant seul sur la piste, un peu mal a l’aise de n’avoir pu étancher sa soif.

 Quelques kilométres plus loin, un grand doute : le road book parle d’un cap au 330° qui ne mène nulle part ! .Nous
retrouvons petit à petit plusieurs 2cv qui tournent aussi en rond et tous réunis nous relisons attentivement le Road Book:
 " A 200 m , après la roche carrée descendre dans wadi rouge  Cap 20° ""
On savait que l’organisateur avait de l’humour mais enfin!
Hésitations, vérifications faites tout le monde à raison, mais personne n’est sûr. Heureusement voici une 2cv qui arrive munie
d’un précieux appareil nommé : G.P.S. ( Global Positionning System ) Grâce à cet appareil guère plus gros que une calculette
, il est possible grâce à un réseau de satellites de connaître sa position à quelques dizaines de mètres prés . Quelques coups
de clavier et sans hésiter la petite merveille d’électronique nous indique le cap à suivre pour rejoindre le prochain point.
La zone devient sablonneuse avec des rochers de couleur rougeâtre et une fois n’est pas coutume, nous arrivons de jour et
presque les premiers au bivouac s’affairent déjà nos amis  bédouins cuisiniers pour le repas du soir. Le cadre est somptueux,
c’est l’avant dernière journée du Raid et après le repas tout le monde se retrouve auprès du feu de camp pour terminer les
dernières bouteilles d’alcool rescapées du voyage. Dans l’euphorie, certains n’hésitent pas à tirer leurs fusées de détresse
pour un bien modeste feu d’artifice ponctué par les éclairs de l’arc électrique d’un concurrent en train de renforcer son
châssis cassé.
Ce soir après le repas, les frontales brilleront un peu plus tard que d’habitude tandis que quelques chants d’inspiration
gauloise iront se répercuter sur les rochers d’ocre rouge .

MERCREDI 15 OCTOBRE

 Réveil à 7 heures pour aujourd’hui une spéciale démarrant du bivouac, ce qui laisse un peu de temps aux retardataires
d’apprécier le petit déjeuner matinal préparé par nos bédouins cuisiniers  : Café en poudre, lait en poudre, sucre, confiture de
figues, fêta et pain galette. Une théière d’eau bouillante et voila un excellent petit déjeuner pris debout ou assis par terre .
 " Briefing ... Briefing ....  "
A ne pas manquer absolument . Tout le monde se tait et écoute religieusement ( le Mont Sinai n’est pas très loin , )  le guru (
l’organisateur ) donner les dernières recommandations pour la journée, les erreurs sur le Road Book, les points de
ravitaillement ... etc. .....
Le camp se vide peu à peu tandis que les 2cv s’élancent sous les ordres du commissaire :

   15 secondes !

On vérifie son harnais, un coup d’oeil au Road book pour s’assurer de la bonne page, un coup d’oeil au compas, mise a zéro
du partiel;

 5  -  4  -  3  -  2  -  1  -  Partez !
 

 La 2cv s’extirpe du sable et la voila partie en glissades vers le prochain point désigné dans le Road Book .
Suite à nos deux précédentes mésaventures en doublant les concurrents que nous rattrapons, nous avons décidé d’assurer .
Tout va bien à bord et au bout de quelques Kms nous apercevons devant nous un bon nombre de 2cv immobilisées dans une
zone de fech fech (sable très mou ) .
 " Passe en 4x4 et à fond à droite " criais je au pilote fort occupé à éviter les grosses pierres de la piste .
La tactique a payée se renouvellera deux fois . Nous sentons que aujourd’hui  on est pas mal . Un petit doute sur la fin de la
spéciale . Nous nous arrêtons , perdons quelques précieuses secondes pour nous rendre compte que l’arrivée est à une
centaine de mètres devant nous .Nous passons la ligne et le verdict tombe : 4° temps de la spéciale ! .
Tout heureux nous entamons la liaison qui doit d’ après le Road book nous amener vers une route goudronnée. Auparavant,
cerise sur le gâteau l’organisateur sympa a prévu la " descente aux enfers " Une pente de 60% de sable fin dans laquelle nous
engageons prudemment le capot de notre 2cv . Ce ne sont plus les roues qui tournent , mais toute la masse de sable fin qui
descend avec la 2cv!
Un coup d’oeil sur le road book et  petit pincement au coeur : dans 3Kms nous retrouverons comme le dit si bien le road
book :" asphalte pourri " .
La fin du Raid approche et on en arrive a regretter cette piste ou il faut à chaque mètre se battre avec les cailloux ou le sable.
Nous roulons dans un paysage de carrières avec le long de la route des tas blancs et des tas noirs . Les premiers sont du
kaolin et les seconds du manganèse . " Danger camions " précise le road book . Prudence en effet et nous croisons quelques
camions roulant à gauche, peu habitués a croiser des voitures sur cette route qui ne vient de nulle part . Petit aperçu de ce que
sera la circulation durant la traversée du delta du Nil pour revenir à Alexandrie .
Nous arrivons à Ras El Sudr sur le bord du Golfe de Suez. La bière locale " Stella " est décidément fort bonne ( c’est vrai ).
Un petit détour à la plage du coin pour découvrir un endroit fort pollué envahi de raffineries de pétrole, puis route vers le
dernier bivouac situé dans les derniers Kms de désert qui précédent le Delta du Nil. Péage pour emprunter le tunnel
permettant de franchir le canal de Suez  et nous retrouvons nos amis bédouins cuisiniers pour ce dernier repas dans le désert.
Après le repas , briefing . L’organisateur nous annonce que compte tenu de la distance qui nous sépare d’Alexandrie (
300Kms )et la densité de la circulation, le départ est fixé à 5 h du matin. Il nous faut être au port à 11h et il ne faut pas
espérer réaliser plus de 50Km/h de moyenne sue des routes encombrées de bus, camions, vélos, piétons, ânes , poules .... La
journée de demain sera la plus dangereuse du Raid .
Un peu inquiet je creuse mon trou dans le sable et m’endors à la belle étoile en contemplant un fabuleux ciel étoilé. Un peu
plus tard je suis réveillé par quelque chose de bizarre, d’anormal. Plus d’étoiles au ciel. Un épais brouillard fréquent parait il
dans le Delta du Nil nous recouvre de son silence . Branle bas de combat: tout est trempé . Duvet, sac, vêtements, . Vite
c’est l’heure. Petit déjeuner et en route . Le cauchemar commence.  Dans l’épais brouillard nous croisons en sursautant des
camions sans lumière, la route disparaît après un passage à niveau  et repart un peu plus loin à gauche . Travaux : La route est
coupée , tous les panneaux sont en arabe " macache wallou ! ," Le rallye s’éparpille et heureusement que un 4x4 de
l’organisation jouant les Saints Bernard  regroupe tout le monde. La circulation est très importante malgré l’heure

matinale. Pas une seule voiture de tourisme et 99,9% de la circulation est composée de camionnettes et de bus bondés.
Quelques bout de route à double voie ou l’on trouve circulant à contresens des troupeaux de vaches ,des vélos, des piétons.
Et même garé sur la file de gauche une camionnette sur chandelles dont le chauffeur vient de s’attaquer à la remise en état des
freins arrières !
 Pas de priorité, tout se passe au klaxon . Après avoir échappé de peu à l’encastrement sous un camion traversant la voie
rapide, nous arrivons en vue d’Alexandrie vers 11h10. Direction porte 10 . " Mina (le port ) Bab Ashara (porte 10)
Schroukane (Merci ) Nous demandons notre route, et un Egyptien se propose de nous guider . Il prend du passager (et le
seul siège de libre ) et me re - voila debout sur le pare choc arrière dans la traversée d’Alexandrie. Mais ici personne ne
s’étonne , pas même les policiers ! . La conduite en Egypte est une épreuve redoutable. Tous les feux sont rouges mais
personne ne s’arrète. Les policiers casqués et vêtus de blanc à chaque carrefour font penser à une ballerine égarée dans une
mêlée de rugby ! . Personne ne s’arrête , tout le monde klaxonne à tort ou à raison et s’invective à qui mieux mieux.
Inimaginable: à donner le stress à un chauffeur de taxi parisien. Une atmosphère de départ de formule 1 avec des Schumaker
et Villeneuve barbus et moustachus au volant de camionnettes  surchargées.
Après l’effort le réconfort . 22Heures , remise des prix sur un bateau restaurant qui descend le Nil. Accueil grandiose ,
musique , danses folkloriques ; Nous sommes revenus parmi les touristes . Dernière nuit à l’hôtel, un peu de tristesse ,
aéroport du Caire , Paris . C’est fini .....  On se quitte dans l’aéroport en se jurant que l’on fera le prochain Raid . Bravo les
organisateurs . A la prochaine .

PS: La prochaine en l’occurrence c’est le Malaga Dakar en 2cv en Avril 99.
 ( J’essaierai d’être un peu plus rapide pour en écrire le compte rendu.)

           Henri Lenguin